Les vagues scélérates

6ème et dernier épisode de notre série consacrée aux vagues : Ici les vagues scélérates

Retrouvez les épisodes précédents :

1. Vagues – Généralités
2. Comprendre les vagues – La mer du vent
3. Les vagues, le courant et les mers croisées
4. L’échelle de Douglas
5. Les vagues et l’influence du relief

Les auteurs de récits maritimes (Bougainville, Conrad, Moitessier, Janichon…) évoquent parfois, quelle que soit leur époque, des vagues immenses, énormes, menaçantes, impossibles à prévoir et parvenant parfois d’une direction différente de la houle de la zone….

Vagues scélérates : Un phénomène terrifiant

Ces vagues géantes et terrifiantes sont capables de raser les superstructures d’un grand voilier en bois de l’époque de la marine à voile. 

La hauteur de telles vagues étant très difficile à déterminer depuis un pont, et la science ayant convenu, jusqu’à la fin du XIXe siècle qu’une vague ne saurait dépasser les 12m de hauteur, on les a longtemps considérées, à terre, comme le fruit de l’imagination des marins…

Face à la vague

La SWH

Depuis, l’océanographie s’est affinée. L’acronyme Significant Wave Height (SWH) désigne la hauteur moyenne des vagues en un point donné des mers. 

Une vague scélérate mesure, tout simplement, au moins deux fois la SWH.

La vague la plus importante jamais mesurée par une bouée météo américaine (et non pas observée, les mesures sont impossibles à réaliser et les rescapés sont rares) a été relevée en 1983 à plus de 20 mètres de hauteur SWH.

Les vagues scélérates rencontrées par  les… rescapés

En mer du Nord, la plateforme Draupner a été heurtée en hiver 1995, par une vague dont on estime sa hauteur, en observant les dégâts suivis, à 31 m.

Le porte-avion américain Valley Forge perdit en 1959 une partie de son pont d’envol au large de la Caroline du nord, touché par une Rogue wave, une vague scélérate.

Dégâts sur le Valley Forge

Les paquebots de la ligne Cunard, les Queen Mary et Queen Elizabeth I des années 1940 et le Queen Elizabeth II ont, tous trois, encaissé des vagues qui devaient atteindre les 30 mètres de hauteur, leur occasionnant d’importants dégâts (passerelles balayées, vitres soufflées…).

Le 6 février 1963, le croiseur école de la Marine Nationale, la Jeanne d’Arc, encaissa, par force 5 à 6 de vent et Mer 6 (creux de 7 à 8 mètres)  3 vagues de plus de 20 m de haut qui faillirent la perdre (Retrouvez ici le récit officiel).

Comment naissent ces vagues scélérates ?

La taille de la vague par rapport à un cargo et un homme

L’épisode météorologique violent

Les vagues nées de l’action du vent sur le fetch forment des séries plus ou moins régulières.

Quand survient un orage ou une tempête, les vagues générées par le vent de ces phénomènes peuvent lever une houle provenant d’une autre direction. 

Si ces deux trains de vagues se rencontrent sensiblement dans le même axe, leur résultante sera, de temps en temps, une vague nettement plus haute que les autres, lorsque les sinusoïdes des deux trains de vagues vont correspondre…

C’est la vague scélérate.

La vague de tsunami

Tsunami

Le mécanisme des tsunamis tire son énergie de mouvements de l’écorce terrestre d’origine magmatique et provoque le mouvement d’immenses quantités d’eau de mer. Ce déplacement est matérialisé en surface par une onde, qui n’est pas forcément impressionnante et ne dépasse que rarement le mètre de hauteur. En revanche, ce qui est impressionnant, c’est la vitesse de déplacement: près de 800 km/h. 

La gigantesque énergie emmagasinée sous forme de vitesse est prête à se libérer au contact de trains de vagues de forte houle en une vague scélérate dangereuse.

La même vague de tsunami, qui rencontrerait une remontée des fonds, se transformerait immédiatement en vigueur d’une hauteur gigantesque.

C’est ce phénomène qui rend meurtriers les tsunamis lorsqu’ils abordent les côtes. Leur énergie, chassée vers la surface par la remontée des fonds en décuple la hauteur à la côte.